NAPOLÉON

18/01/2012 21:31

 

1769 (Ajaccio) - 1821 (Ste-Héléne)

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Napoléon Bonaparte

Napoleone Buonaparte, francisé en Napoléon Bonaparte, (né le 15 août 1769 à Ajaccio, en Corse ; mort le 5 mai 1821 sur l’île Sainte-Hélène), général devenu Empereur des Français et conquérant de l’Europe, est une des figures les plus marquantes de l’histoire de France et de l’Europe, et une des plus connues et des plus passionnément admirées ou critiquées de l’Histoire du monde. Objet dès son vivant d’une légende noire comme d’une légende dorée, il a acquis une notoriété aujourd’hui universelle pour son génie militaire et politique, mais aussi pour son régime de pouvoir personnel très autoritaire, et pour ses incessantes campagnes souvent coûteuses, soldées par de graves défaites finales en Russie et à Waterloo et par sa mort en exil à Sainte-Hélène aux mains des Anglais.

Général de la Révolution française à 26 ans, il accumule les victoires spectaculaires en Italie et pendant la campagne d’Égypte, puis revient prendre le pouvoir par le coup d’État du 18 brumaire an VIII (9 novembre 1799).

Il dirige la France à partir de la fin de l’année 1799 ; il est d’abord Premier consul du 10 novembre 1799 au 18 mai 1804 puis Empereur des Français, sous le nom de Napoléon Ier, du 18 mai 1804 au 11 avril 1814, puis du 20 mars au 22 juin 1815. Il réorganise et réforme profondément l’État et la société ; nombre de ses institutions subsistant encore de nos jours. Il porte le territoire national à son extension maximale avec près de 130 départements, transformant Rome, Hambourg ou Amsterdam en chefs-lieux de départements français. Il est aussi président de la République italienne de 1802 à 1805, puis roi d’Italie du 17 mars 1805 au 11 avril 1814, mais encore médiateur de la Confédération suisse de 1803 à 1813 et protecteur de la Confédération du Rhin de 1806 à 1813. Il conquiert et gouverne la plus grande partie de l’Europe continentale et place les membres de sa famille sur les trônes de plusieurs royaumes européens : Joseph sur celui de Naples puis d’Espagne, Jérôme sur celui de Westphalie, Louis sur celui de Hollande et son beau-frère Joachim Murat à Naples. Il crée aussi un grand-duché de Varsovie, sans oser restaurer formellement l’indépendance polonaise, et soumet à son influence des puissances vaincues telles que la Prusse et l’Autriche.

Napoléon tenta de mettre un terme à son profit à la série de guerres que menaient les monarchies européennes contre la France depuis 1792. Il conduisit les hommes de la Grande Armée, dont ses fidèles « grognards », du Nil et de l’Andalousie jusqu’à la ville de Moscou. Comme note l’historien britannique Eric Hobsbawm, aucune armée n’était allée aussi loin depuis les Vikings ou les Mongols. Malgré de nombreuses victoires initiales face aux diverses coalitions montées et financées par la Grande-Bretagne (devenue le Royaume-Uni en 1801), l’épopée impériale prend fin en 1815 avec la défaite de Waterloo.

Peu d’hommes ont suscité autant de passions contradictoires que Napoléon Bonaparte. Selon les mots de l’historien Steven Englund : « le ton (...) qui convient le mieux pour parler de Napoléon serait (...) une admiration frisant l’étonnement et une désapprobation constante frisant la tristesse. »

Toute une tradition romantique fait précocement de Napoléon l’archétype du grand homme appelé à bouleverser le monde. Élie Faure, dans son ouvrage Napoléon qui a inspiré Abel Gance, le compare à un prophète des temps modernes. D’autres auteurs tels Victor Hugo font du vaincu de Sainte-Hélène le Prométhée moderne. L’ombre de “Napoléon le Grand” plane sur de nombreux ouvrages de Balzac, Stendhal, Musset, mais aussi de Dostoïevski, de Tolstoï et de bien d’autres encore.

Hudson Lowe, geôlier de Napoléon à Sainte-Hélène, devant son lit de mort, a déclaré :

« Messieurs, c’était le plus grand ennemi de l’Angleterre, c’était aussi le mien. Mais je lui pardonne tout. À la mort d’un si grand homme, on ne doit éprouver que tristesse et profond regret. »

 

 

Jeunesse et ascension dans l’armée

NAISSANCE DE NAPOLÉON

Napoléon Bonaparte naît à Ajaccio en Corse, le 15 août 1769 avec le nom de famille italien "Buonaparte", un an après l’achat par la France de l’île à Gênes (1768). Issu d’une famille faisant partie de la petite noblesse corse/italienne fière mais peu fortunée (Maison Bonaparte d’origine toscane), il est le deuxième enfant de Carlo Maria Buonaparte, avocat au Conseil Supérieur de l’île, et de Maria Letizia Ramolino.

LA FORMATION MILITAIRE

En 1777, Charles Bonaparte fait partie de la députation que l’Assemblée générale des États de la Corse envoie à Versailles auprès du roi Louis XVI. C’est à cette occasion, et par l’influence de Yves Alexandre de Marbeuf|M. de Marbeuf, évêque d’Autun, neveu du lieutenant-général Charles Louis de Marbeuf, lequel avait des obligations à la famille Bonaparte, que Charles obtient pour son fils Napoléon une bourse à l’École royale militaire de Brienne-le-Château (Aube).

En janvier 1778, Napoléon est amené provisoirement par son père au collège d’Autun ; il a alors neuf ans et demi. Son père s’arrange pour qu’il suive des études sur le continent, où Napoléon s’établit, en compagnie de son frère aîné Joseph.

Charles Bonaparte ayant fourni les preuves de noblesse exigées par les règlements pour l’admission des élèves à l’École militaire de Brienne, Napoléon y entre le 23 avril 1779. C’est l’un des douze collèges de France qui accueillent les enfants de la noblesse pauvre. Il va y rester cinq ans. Bon élève, Bonaparte n’est pas très aimé de ses camarades. Il montre déjà une propension à l’art du commandement, en organisant des jeux militaires dont il prend la tête. Une bataille de boules de neige qu’il aurait dirigé un hiver devient plus tard une véritable image d’Epinal.

En 1784, son mari étant mort et malgré les bourses accordées, la mère de Napoléon éprouve des difficultés à financer les études de tous ses enfants : son fils Joseph étudie le droit, Lucien entre au séminaire d’Aix-en-Provence et ses sœurs sont éduquées par Mme Campan. Napoléon Bonaparte, qui doit donc trouver un revenu rapidement pour soulager sa famille, est jugé apte à passer l’examen d’entrée à l’École militaire de Paris, afin de parfaire sa formation. Il y entre comme cadet gentilhomme le 22 octobre. Étudiant le Traité de mathématiques de Bezout jour et nuit, il conclut sa formation en 10 mois au lieu des 4 années standard et, en septembre 1785, il entre avec son ami Grenier dans l’artillerie, au sein du Régiment de La Fère, à Auxonne. Il est alors affecté comme lieutenant en second à Valence en 1787.

LES PREMIÈRES ARMES

Lorsque la Révolution éclata en 1789 le lieutenant Bonaparte est en garnison en province. Présent ponctuellement à Paris, il est spectateur de l’invasion des Tuileries par le peuple le 20 juin 1792 et aurait manifesté alors son mépris pour l’impuissance de Louis XVI. Ce dernier signe quelques jours plus tard son brevet de capitaine, un de ses derniers actes publics. Napoléon retourne à plusieurs reprises en Corse, où les luttes de clans avaient repris, les paolistes soutenant la monarchie modérée à l’anglaise, et les Bonaparte la Révolution. Napoléon se fait élire à la tête de la Garde nationale en 1792 en arrachant de force l’accord du commissaire du gouvernement. Mais l’exécution du roi provoque une révolte des indépendantistes.

Les désaccords entre Paoli et Bonaparte s’accentuent et suite à une lettre de Lucien Bonaparte à la Convention pour dénoncer Paoli, la famille de Napoléon, dont la maison a été mise à sac, est contrainte de quitter l’île précipitamment à destination de Toulon, le 10 juin 1793. Peu après l’arrivée des Bonaparte dans le Midi, la région se révolte contre la Convention et Toulon est livré aux Britanniques par la population révoltée.

Capitaine d’artillerie, Bonaparte y est envoyé à l’automne 1793 et obtient à la demande des commissaires Augustin Robespierre - avec qui il se lie - et son compatriote Salicetti, le commandement de l’artillerie, avec le grade de chef de bataillon. Il y rencontre de jeunes officiers comme Marmont, Junot ou Victor. Le plan qu’il soumet au général Dugommier permet la reprise de la ville aux troupes royalistes et britanniques le 18 décembre. Ses ordres contribuent à forcer la flotte britannique à quitter la rade de Toulon et à priver ainsi les insurgés d’un soutien précieux. Il est fait général de brigade le 22 décembre. Après cette victoire, il sert en Italie.

Ses amitiés avec les jacobins lui valent d’être brièvement arrêté après la chute de Robespierre le 9 Thermidor an II (27 juillet 1794).

LE 13 VENDÉMIAIRE, LE MARIAGE ET L’ARMÉE D’ITALIE

Libéré, il refuse d’être affecté en Vendée et erre à Paris un temps sans commandement effectif, puis Barras lui offre de combattre l’insurrection royaliste de Vendémiaire contre la Convention en 1795. À cette occasion, Bonaparte a sous ses ordres un jeune officier, Joachim Murat, son futur beau-frère. Ce dernier joue un rôle déterminant, en transférant à temps les canons indispensables depuis les Sablons jusqu’aux abords des Tuileries. La canonnade de Saint-Roch dispersent les forces royalistes. Quelques jours plus tard, Bonaparte est promu général de division, puis nommé commandant de l’armée de l’Intérieur, succédant à Barras qui devient l’un des 5 membres du Directoire.

Officier d’artillerie de formation, il innove vers cette époque dans l’utilisation de l’artillerie (canon de Gribeauval) comme force mobile d’appui des attaques d’infanterie.

Il doit à Joséphine de Beauharnais, amie et ancienne maîtresse de Barras, qu’il vient d’épouser au début de 1796, sa promotion à la tête de la petite armée d’Italie, appelée en principe à ouvrir un simple front de diversion.

CAMPAGNE D’ITALIE

Nommé le 2 mars 1796 commandant en chef de l’armée d’Italie de 40 000 hommes « nus, mal nourris[2] », il bat à plusieurs reprises l’armée autrichienne du général Beaulieu plus nombreuse et mieux équipée : Montenotte, Lodi, ou Arcole - où Napoléon mène lui-même l’assaut, au cours duquel son ami et aide-de-camp Muiron est tué. Il bat également l’armée sarde à la batailles de Millesimo et de Mondovi en avril 1796. Les Sardes, vaincus, demandent un armistice, qui sera signé à Cherasco, le 28 avril 1796. En 18 jours, Bonaparte a battu deux armées, remporté de nombreuses victoires, qui vont assurer sa popularité en France. Déjà vaincu à Arcole, le général autrichien Alvinczy revient en janvier 1797 avec une armée de 45 000 hommes en Italie et est battu de nouveau à la bataille de Rivoli et est obligé de capituler le 2 février 1797. Au printemps, Bonaparte bat l’armée autrichienne de l’archiduc Charles sur Le Tagliamento (mars 1797) puis à la bataille du col de Tarvis (avril 1797) et encore à la bataille de Neumarkt (avril 1797). Suite à cette dernière défaite, les Autrichiens demandent un armistice. L’Autriche doit négocier un traité défavorable à Campo-Formio en octobre1797.

En Italie, le général Bonaparte prend conscience de ses forces et de la situation qui est la sienne. Il règne sur les champs de bataille et a la faveur du public (italien comme français) : une petite cour se forme autour du général républicain à Milan. Pour augmenter l’éclat de ses victoires, il crée deux journaux Le Courrier de l’armée d’Italie et La France vue de l’armée d’Italie. Par ce biais, Bonaparte s’attache les sentiments de ses soldats et des Français.

CAMPAGNE D’ÉGYPTE

À son retour d’Italie, en décembre 1797, Bonaparte est accueilli comme un héros par le Directoire qui organise une cérémonie officielle pour célébrer la paix de Campo-Formio. Il est nommé membre de l’Institut dans la classe de mathématiques. En février 1798, le Directoire soumet à Bonaparte l’idée d’une invasion de l’Angleterre. il inspecte les côtes françaises de Boulogne, Calais et Dunkerque, en vue de la réalisation du projet. Sa popularité auprès des Français est de plus en plus importante. Le 23 février 1798, le gouvernement abandonne le projet d’invasion de l’Angleterre sur les conseils de Bonaparte, qui, lui-même influencé par Talleyrand, persuade alors le Directoire de porter la guerre en Égypte, où il pourra couper la route des Indes à la Grande-Bretagne. Le 24 février 1798, le rapport est présenté à Barras ; le 5 mars, inquiet de la popularité de Bonaparte, le Directoire le charge de mener l’expédition en Égypte, avec aussi l’idée de s’en débarrasser.

En avril 1798 est créée l’armée d’Orient, placée sous les ordres de Bonaparte. Des scientifiques formant l’Institut d’Égypte l’accompagnent. Il est, en outre, accompagné des généraux Kléber, Desaix, Murat, Lannes, Davout et Caffarelli.

Le 19 mai 1798, Bonaparte quitte Toulon avec le gros de la flotte française et parvient à échapper à la poursuite de la flotte britannique de Nelson. Au passage, les Français s’emparent de Malte, le 10-11 juin 1798, pour assurer les communications ultérieures avec la métropole. Le 19 juin 1798, après avoir laissé une garnison de 3 000 hommes sur place, la flotte met le cap sur Alexandrie qu’elle atteint le 1er juillet 1798. Après une courte résistance, la ville est prise le lendemain.

Bonaparte laisse 3 000 hommes à Alexandrie et remonte le Nil vers Le Caire. Le premier véritable combat de la campagne d’Égypte a lieu à Chebreïs le 13 juillet 1798 où les cavaliers mamelouks sont défaits, grâce à l’artillerie de l’armée d’Orient. Le 21 juillet 1798, à la bataille des Pyramides de Gizeh, Bonaparte bat à nouveau l’armée des mamelouks. Le 24 juillet 1798, Bonaparte et son armée entrent triomphalement au Caire. Les 1er et 2 août 1798, la flotte française est presque entièrement détruite à Aboukir par les navires de Nelson. Désormais, les Britanniques sont maîtres de la Méditerranée et Bonaparte est prisonnier de sa conquête. Suite à cette défaite, les Turcs,le 9 septembre 1798, déclarent la guerre à la France. Il faut rappeler qu’à cette époque l’Égypte fait partie de l’empire ottoman, comme la majorité du Moyen-Orient.

Pendant qu’il décide de faire de l’Égypte un véritable État capable de vivre en autarcie, Bonaparte envoie le général Desaix poursuivre Mourad Bey jusqu’en Haute-Égypte, complétant ainsi la soumission du pays. Poussé par les Britanniques et les Turcs, les mamelouks survivants travaillent la population du Caire, qui se révolte le 21 octobre 1798 contre les Français. Cette révolte est impitoyablement réprimée par les troupes. Le calme revient et Bonaparte rétablit la situation en décrétant finalement une amnistie générale, non sans avoir fait couper bon nombre de têtes exhibées à la foule terrorisée et canonner la Grande Mosquée du Caire. En février 1799, Bonaparte se déplace en Syrie pour affronter les troupes ottomanes que le Sultan a envoyées pour attaquer les Français en Égypte. Le 10 février 1799, Bonaparte quitte le Caire avec son armée et bat les Turcs aux combats d’El-Arich et de Gaza. Le 7 mars 1799, la ville de Jaffa est prise et pillée par les Français. C’est à ce moment-là que la peste apparaît dans les rangs des Français.

Le 19 mars 1799, Bonaparte met le siège devant Saint-Jean d’Acre. Le 13 avril 1799, les cavaliers de Junot mettent en déroute les cavaliers ottomans à la bataille de Nazareth et le 16 avril 1799, Bonaparte et Kléber écrasent l’armée turque de secours envoyée par le Sultan pour libérer le siège de Saint-Jean d’Acre à la Bataille du Mont-Thabor. Bien que victorieuse à cette bataille, le 16 avril 1799, l’expédition en Syrie sera décimée par la peste puis arrêtée à Acre. Bonaparte règle de manière expéditive le sort des pestiférés de Jaffa.

De retour à Acre, Bonaparte essayera en vain, du 24 avril au 10 mai 1799, de prendre la ville. Le 17 mai 1799, Bonaparte décide d’abandonner le siège et retourne en Égypte. Le 14 juin 1799, il arrive au Caire et, dans un retournement de situation, bat les Turcs le 25 juillet 1799 à la bataille d’Aboukir.

La situation du Directoire lui paraissant favorable à un coup de force, Bonaparte, qui n’a plus qu’une armée de terre affaiblie, ayant perdu sa marine, abandonne le commandement de l’armée d’Égypte à Kléber.

RETOUR À PARIS, SITUATION DE LA FRANCE

Il rentre en France, le 23 août 1799, en catimini, à bord de la frégate La Muiron, abandonnant au général Kléber une armée diminuée et malade. Il débarque à Fréjus le 9 octobre 1799 après avoir miraculeusement échappé aux escadres britanniques pendant les 47 jours de la traversée.

Sur le chemin qui le mène à Paris, il est acclamé par la population. Jean-Baptiste Kléber se révéle un excellent administrateur et le 20 mars 1800, réalise l’exploit de vaincre les Turcs à la bataille d’Héliopolis. Cette victoire permet à la France de conserver l’Égypte, mais Kléber meurt assassiné, le 14 juin 1800 au Caire, le jour où Napoléon gagne de justesse la bataille de Marengo en Italie, grâce à la charge héroïque de Desaix, qui est tué lors de l’assaut.

Le successeur de Kléber, le général Menou, capitule le 31 août 1801 devant les forces turco-britanniques après avoir perdu 13 500 hommes, principalement victimes des épidémies au cours des négociations de paix. Les soldats français restants sont rapatriés sur les vaisseaux britanniques vers la France.

 

 

Le Consulat

LE COUP D’ÉTAT

Arrivé dans la capitale, le général s’entretient avec Talleyrand, homme politique d’expérience et fin connaisseur des forces en jeu.

Coup d’État du 18 brumaire.

Le schéma du coup d’État du 18 Brumaire (9 novembre 1799) prévoit les opérations suivantes : Bonaparte aura le commandement en chef de l’armée pour le maintien de l’ordre dans Paris et dans les assemblées. On envisage de déplacer les assemblées à Saint-Cloud sous le prétexte d’un péril jacobin. En effet, depuis 1789, les assemblées se trouvent toujours sous la menace de la population parisienne.

L’essentiel des événements se déroule le 19 brumaire à Saint-Cloud. Les révisionnistes avaient envisagé une démission collective des cinq directeurs, mais les assemblées ont du retard car cette idée ne fait pas l’unanimité ; Bonaparte s’impatiente et décide d’intervenir.

Il tient un discours maladroit devant le Conseil des Cinq-Cents, discours très mal perçu par les députés qui l’accusent de vouloir instaurer la dictature. Bonaparte est alors contraint de quitter l’assemblée. Mais il prend rapidement la situation en main avec l’aide de son frère Lucien qui préside les cinq-cents. Lucien évite que Napoléon soit mis en cause par les députés qui veulent voter pour mettre hors-la-loi Bonaparte. Lucien retarde le vote et va chercher Murat qui vient avec la troupe et met de l’ordre dans les assemblées, disant que certains députés voulaient poignarder Bonaparte pour justifier une intervention de l’armée.

Les représentations des députés sortant par les fenêtres et voulant poignarder Napoléon sont très répandues. Bonaparte est de fait l’homme fort de la situation, qui fait basculer un coup d’État parlementaire en un coup d’État militaire. Mais Bonaparte reste attaché aux formes juridiques et dans la soirée du 19 Brumaire, les députés restent à Saint-Cloud pour voter la décision de nommer deux commissions pour préparer une nouvelle constitution. On constate alors une volonté d’appuyer le régime sur le vote des représentants du peuple.

Le 20 Brumaire les trois Consuls sont désignés : Bonaparte, Sieyès et Ducos. C’est le début du Consulat. Roger Ducos est tout acquis à Bonaparte, alors que Sieyès lui n’entend pas se résigner à abandonner le pouvoir à Bonaparte seul. Il entend bien jouer un rôle dans le gouvernement du Consulat. Pour contrecarrer son encombrant collègue, Bonaparte, multipliant les provocations, maintient aux portefeuilles ministériels les ennemis de Sieyès en offrant les relations extérieures à Talleyrand et celui de la Police à Fouché.

Le travail de rédaction de la Constitution est confié officiellement à deux commissions législatives formées de députés des Cinq-Cents et des Anciens. Mais en fait, c’est Sieyès qui va proposer un projet. À l’examen, le projet s’avérera trop complexe, voire irréaliste. En effet, il prévoit l’instauration d’un régime démocratique fondé sur un pouvoir législatif fort représenté par trois chambres. L’exécutif sera, quant à lui, réduit à une magistrature à vie purement honorifique et à deux consuls aux fonctions limitées.

Bonaparte profite des faiblesses de ce plan pour imposer son propre projet et se débarrasser de son encombrant rival. Du 4 au 13 décembre 1799, il réunit ainsi les deux commissions dans son bureau pour élaborer le texte de la nouvelle constitution.

La Constitution de l’an VIII est adoptée en comité restreint le 13 décembre 1799. Elle s’inspire en partie du projet de Sieyès, mais intègre les idées politiques de Napoléon Bonaparte, notamment concernant le pouvoir exécutif. Sieyès, lui-même, sera chargé de désigner les trois consuls de la république : Bonaparte comme premier consul, puis Cambacérès et Lebrun, comme 2e et 3e consuls de la République. Sieyès, quant à lui, sera relégué au poste de président du Sénat.

LA CONSTITUTION

La Constitution de l’an VIII entre en vigueur le 25 décembre 1799. Bonaparte établit la Constitution sous des apparences démocratiques, mais organise un pouvoir autocratique, toutes les évolutions du régime ne feront qu’accentuer le caractère autocratique du pouvoir.

Le pouvoir législatif est divisé en trois assemblées (tricamérisme) :

-  le Tribunat discute les lois sans les voter 
-  le Corps législatif (ou « Corps des muets ») adopte ou rejette les lois 
-  le Sénat est chargé de vérifier que la loi est conforme à la constitution.

La préparation de la loi appartient à l’exécutif, par le biais du Conseil d’État, chargé de rédiger les textes législatifs.

Le pouvoir fonctionne de manière autoritaire, les procédés de démocratie semi-directe (quelque peu fictive) sont soigneusement organisés et contrôlés. Le consul corrige lui-même les résultats s’ils ne sont pas satisfaisants. Le Consulat est une forme de despotisme éclairé.

DU CONSUL À L’EMPEREUR

Le Premier Consul franchissant les Alpes au col du Grand-Saint-Bernard par Jacques-Louis David Le Premier Consul franchissant les Alpes au col du Grand-Saint-Bernard par Jacques-Louis David

En 1800, Bonaparte attaqua et vainquit l’Autriche une nouvelle fois. Battus à Marengo par Napoléon et à Hohenlinden par Moreau, les Autrichiens durent signer le traité de Lunéville le 9 février 1801, ce qui amena les Britanniques à signer la paix d’Amiens le 25 mars 1802 (4 germinal an X, contresignée deux jours plus tard). Si son pouvoir était fragile au lendemain de Brumaire, la victoire de Marengo et ses suites consolidèrent fortement la situation de Bonaparte.

Le 24 décembre 1800, une « machine infernale » (bombe) l’attendait rue Saint-Nicaise. Le cocher du Premier consul passa au grand galop. La bombe explosa trop tard et seules les vitres du véhicule furent soufflées. Sur place, en revanche, ce fut le carnage. On dénombra 22 morts et une centaine de blessés. Fouché, alors ministre de la Police, réussit à prouver que l’attentat était l’œuvre des royalistes, alors que Bonaparte était persuadé avoir affaire aux Jacobins. L’exécution du duc d’Enghien en sera une conséquence.

En 1802, Bonaparte demande que les cendres du Maréchal de Turenne soient transférées aux Invalides. Il est en effet un fervent admirateur de Turenne, dont il reprendra avec succès la stratégie d’attaque par surprise (Bataille de Turckheim, 1675) dans ses campagnes de 1805 à 1812. Par la suite, enivré par ses victoires, s’engageant avec témérité en Russie avec la Grande Armée, il oubliera que toute campagne nécessite une étude approfondie et collective du terrain et de la psychologie de l’ennemi.

La même année, Bonaparte rétablit l’esclavage dans les colonies. Ce rétablissement devait faire repartir une économie défaillante dans les colonies des Antilles.

Il fallut attendre 1848 pour que l’abolition définitive de l’esclavage soit promulguée.

Bonaparte vendit la Louisiane, immense territoire d’Amérique du Nord, aux États-Unis, en 1802.

Il envoya une armée forte de 34 000 hommes à Saint-Domingue sous les ordres du général Leclerc pour rétablir l’autorité de la France. Après quelques succès, notamment la capture de Toussaint Louverture (qui mourut au Fort de Joux, dans le Doubs, le 7 avril 1803), son armée fut anéantie en partie par une épidémie de fièvre jaune.

Après que Bonaparte étend son influence sur la Suisse, qui mit en place les institutions décentralisées actuelles, et sur l’Allemagne, une dispute à propos de Malte servit de prétexte aux Britanniques pour déclarer une nouvelle fois la guerre à la France en 1803, et pour soutenir l’opposition royaliste à Bonaparte. Celui-ci réagit : l’idée d’une invasion du Royaume-Uni se fait jour, et pour ramener à la raison les royalistes, qui, peut-être, complotent dans l’ombre, le Premier consul fait exécuter le duc d’Enghien, prince Bourbon. L’exécution qui se déroule à Vincennes après un simulacre de procès, ne suscite pas d’autres protestations que celles du Royaume-Uni, de la Russie et de l’Autriche s’en tenant à quelques timides reproches. Voilà cependant l’acte qui assoit la réputation de « Robespierre à cheval » de Napoléon (à Sainte-Hélène, Napoléon assumera cet acte, malgré la très probable implication de Talleyrand). Après ce gage donné aux républicains, dans la mesure où le Premier consul réitère le crime des régicides, celui-ci se couronne Empereur le 2 décembre 1804.

À proprement parler, l’Empire naît à la demande du Sénat. Steven Englund se rallie à l’opinion selon laquelle il s’agissait, initialement, de protéger la République. Le Consulat abattu, l’ordre se serait effondré avec lui. Empereur, il devenait une institution, scellant la pérennité des valeurs républicaines. Il pouvait mourir : l’hérédité du titre était censée protéger le pays des bouleversements et de la perte des acquis révolutionnaires (avec, en premier lieu, l’égalité, loin devant la liberté). C’est ainsi que les monnaies impériales portent, sans hypocrisie, la mention « Napoléon Empereur - République française ».

Par suite seulement, cet Empire « républicain », protégeant les acquis révolutionnaires, se fera « impérialiste ».

 

 

L’Empire

LA SYMBOLIQUE IMPÉRIALE

Le sacre impérial, événement unique dans l’Histoire de France représenté sur le tableau de Jacques-Louis David, Le Sacre de Napoléon, est lourdement chargé en symboles. Le passage de la République à l’Empire nécessite la création d’armoiries impériales, ainsi que la création d’objets symboliques destinés à établir une tradition auparavant inexistante. Napoléon, qui se veut rassembleur, décide d’associer aux symboles de son règne les images qui ont pu représenter auparavant la France, ainsi que les pouvoirs forts européens. Le Sacre de Napoléon, de Jacques-Louis David - Cette scène montre le moment où Napoléon prend des mains de Pie VII la couronne impériale pour en coiffer sa femme l’impératrice Joséphine. Le Sacre de Napoléon, de Jacques-Louis David - Cette scène montre le moment où Napoléon prend des mains de Pie VII la couronne impériale pour en coiffer sa femme l’impératrice Joséphine.

L’aigle est choisi en référence aux aigles romaines, portées par les légions, mais il est également le symbole de Charlemagne, l’aigle éployée. C’est d’ailleurs une erreur de lecture qui donnera pour symbole de l’Empire français un aigle aux ailes déployées : en héraldique, éployée se dit des oiseaux et des animaux chimériques représentés avec les ailes étendues (un aigle à deux têtes aux ailes deployées en est un bon exemple). La couleur rouge du manteau impérial, est une référence directe au pourpre de l’imperium romain. Napoléon se pose ainsi en héritier de l’Empire romain et de Charlemagne.

Les abeilles sont censées rappeler les Mérovingiens (des broches les représentant ayant été retrouvées dans des tombeaux de cette époque), et leur disposition sur les armoiries et le manteau impérial doit rappeler les fleurs de lys des capétiens. La main de justice, utilisée par les Capétiens lors des sacres royaux doit faire apparaître qu’il est l’héritier de leur pouvoir. Là, Napoléon veut montrer qu’il est le fondateur de la « quatrième dynastie », celle des Bonaparte, après les Mérovingiens, les Carolingiens, et les Capétiens.

D’autres symboles utilisés pendant le sacre sont chargés de valeurs morales. Ainsi, Napoléon tient un moment le globe de Charlemagne ; il porte la couronne de ce même empereur (ces deux éléments ayant été forgés de toute pièce avant le sacre). Son épée et son sceptre sont dits de Charlemagne : ils ont été en réalité utilisés depuis plusieurs siècles par les Valois puis les Bourbons lors de leurs sacres.

Napoléon arrête le mouvement révolutionnaire mais non la Révolution. En obtenant la confiance des bourgeois (grâce à la vente des biens nationaux, à la paix maritime et continentale, à la création d’une noblesse méritocratique...), grâce au prestige de grandes victoires (Marengo 1800), à la bonne résolution des crises telle celle de 1802 (disette et chômage), Napoléon obtient le soutien populaire et s’affranchit peu à peu du processus révolutionnaire, qui ne lui est plus nécessaire. Au fil des années, alors que sa popularité ne va cesser de croître, il va monter en puissance et s’éloigner de la République. En 1804, après divers complots visant son assassinat et la reprise des hostilités avec le Royaume-Uni, il est perçu comme le seul rempart face aux ennemis de la Révolution, et la question de l’hérédité devient un sujet de préoccupations. Il en profite pour se faire sacrer Empereur (ou plutôt, se sacrer). Ce qui pourrait être vu comme l’aboutissement du projet d’un tyran ne l’est pas. En effet, lors du sacre, Napoléon déclara être dans la continuité de la révolution, et est soutenu par les révolutionnaires eux-mêmes, malgré la fin du processus révolutionnaire.

Les guerres impériales ont perpétué la Révolution. Dans tous les pays conquis, Napoléon Ier impose le Code civil et par conséquent toutes les notions révolutionnaires qui en font partie. Il est considéré dans un premier temps comme le libérateur de l’Europe. Mais à partir de la Quatrième coalition, qui commence en 1806, le but de ces guerres ne sera plus la propagation des idées révolutionnaires. Malgré la défaite napoléonienne de 1815, les idées de liberté et d’égalité resteront fermement implantées dans les pays qui avaient été conquis, et de nombreux bouleversements au fil du XIXe siècle en découleront

Grâce à la modernisation des institutions françaises et européennes, à la pacification du pays, à ses victoires militaires et la conquête de la majeure partie de l’Europe, Napoléon a permis l’expansion et la perpétuation de la Révolution. Ainsi, malgré les nombreux changements de régime lors du XIXe siècle, le Code civil français restera en vigueur dans l’Europe entière, et les nombreux principes révolutionnaires qu’il contient. Napoléon est donc plus le continuateur que l’assassin de la révolution, malgré l’impasse qu’il fit sur la République. En supprimant les cultes révolutionnaires et autres acquis révolutionnaires qui mettaient en danger l’œuvre de la révolution elle-même, il permit aux autres de traverser les époques.

NAPOLÉON ET L’ÉGLISE

Le sacre de Napoléon, sous les yeux du Pape, réduit à bénir le couronnement du maître de la France, est également l’occasion de revenir sur les rapports entre la France et le Vatican. La signature du Concordat par le Premier consul en 1801 reconnaît le catholicisme comme la religion « de la majorité des Français », et non plus religion d’État. Les prêtres reçoivent désormais un traitement de la part de l’État. Restauration catholique, moins de dix ans après la confiscation des biens de l’Église ? Napoléon préserve les apparences : en 1804, ce n’est pas l’Empereur qui ira se faire sacrer à Rome, à l’image des empereurs germaniques, mais ce sera le pape que l’on fera venir à Paris, comme un vulgaire aumônier. Napoléon l’accueille en forêt de Fontainebleau, à cheval et en habit de chasse, mettant ainsi en scène le caractère fortuit de la rencontre. Napoléon l’offensera encore en lui prenant des mains la couronne de l’impératrice, mais surtout en se couronnant lui-même. De cette manière, il affirme la primauté du politique (et donc du séculier) sur le religieux.

LE SACRE DE NAPOLÉON.

Le rapprochement entre Napoléon et l’Église est donc le fruit d’un calcul politique. Au delà de la valeur morale qu’a pu avoir un sacre religieux aux yeux des catholiques, de la valeur symbolique d’un couronnement pontifical rappelant le sacre des empereurs germaniques, Napoléon se place à l’égal, voire au-dessus des rois européens. La présence du Pape au sacre donne une dimension universelle à l’Empire. Celui-ci n’est plus simplement le fruit d’une révolution, c’est un couronnement divin qu’aucun des souverains d’Europe ne peut égaler.

La présence du Pape est donc davantage un message aux pays européens qu’une affirmation catholique tardive d’un ex-révolutionnaire.

Napoléon, d’ailleurs peu sensible au sort du Pape, n’hésitera pas à le retenir prisonnier à Fontainebleau. Dans l’idée d’affirmer la puissance politique, et donc religieuse de la France, il envisagera de transférer la résidence du Pape de Rome à Paris, avant d’abandonner cette idée.

L’EMPIRE VICTORIEUX

Premières années du Premier Empire.

En 1804, l’heure n’est donc pas encore aux vastes conquêtes, et, persuadé depuis longtemps que le seul moyen d’obtenir une paix définitive était de neutraliser le Royaume-Uni, Napoléon mit au point, avec l’amiral Latouche-Tréville (qui mourra avant d’avoir pu l’exécuter), un plan visant à l’invasion du Royaume-Uni. Celui-ci échoua définitivement à la bataille de Trafalgar, où la flotte franco-espagnole commandée par l’amiral de Villeneuve fut disloquée par l’amiral Nelson. Le Royaume-Uni en tira la domination des mers pendant le siècle suivant.

En 1805, la Troisième coalition se forma en Europe contre Napoléon. L’Empereur qui, à Boulogne, supervisait les préparatifs en vue de l’invasion du Royaume-Uni, dut faire face à une guerre soudaine, et à l’autre bout de l’Europe. Il mena une offensive immédiate, acheminant la Grande Armée en Autriche à marche forcée, et s’assura une brillante victoire contre l’Autriche et la Russie à la bataille d’Austerlitz, dite « bataille des Trois-Empereurs ». En 1806, la Prusse provoque un nouveau conflit. La campagne que mène Napoléon est impressionnante de rapidité : « l’Âme du monde » (Hegel) : il balaie l’armée prussienne à la bataille d’Iéna (doublée de la brillante victoire de Davout à Auerstaedt) où avec 30 000 hommes le Maréchal Davout bat les 63 500 prussiens qui l’assailent. L’année suivante, Napoléon traverse la Pologne, remporte une victoire sur les Russes à Friedland et finit par signer, à Tilsit, au milieu du Niémen, en une mise en scène travaillée pour frapper les esprits, un traité avec le tsar Alexandre Ier, divisant l’Europe entre les deux puissances.

Cet homme formé dans les écoles et par les maîtres de l’Ancien Régime, officier de l’armée royale, brise les anciennes conceptions militaires. Il ne s’agit plus de livrer une guerre de siège à l’aide de 30 à 50 000 hommes, mais de rechercher la bataille décisive, engageant plus de 100 000 hommes s’il le faut. Il ne s’agit plus de rester maître du champ de bataille, mais d’anéantir l’ennemi.

En 1808 il crée la noblesse d’Empire : bientôt ses maréchaux et généraux arboreront les titres de comte d’Empire, prince de Neuchâtel, duc d’Auerstaedt, duc de Montebello, duc de Dantzig, duc d’Elchingen, roi de Naples.

Du 27 septembre au 14 octobre 1808, Napoléon donne rendez-vous à Alexandre Ier à Erfurt, pour un nouveau traité, afin qu’ils s’unissent contre l’Autriche qui menace de redéclarer la guerre à la France. Le tsar refuse en préférant que ce traité soit établi dans le but de renouveler l’alliance qui s’était forgée entre eux l’année précédente à Tilsit ; cela permit en fait à Napoléon de s’assurer encore plus longtemps de la fidelité d’Alexandre. Mais ce fut un échec car il s’aperçut bientôt de la trahison de Talleyrand, qui avait approché le tsar en lui conseillant de résister à Napoléon qui ne cessait de séduire ce dernier.

En 1810, Napoléon édifie le « Grand Empire » : d’Amsterdam à Rome, celui-ci compte 130 départements ainsi que plusieurs états vassaux et sa population est de 70 millions d’habitants, dont 30 seulement sont Français ; l’Empire est à son apogée.

Le 2 avril 1810, il épouse l’archiduchesse Marie-Louise d’Autriche, qui, le 20 mars 1811, lui donnera le fils qu’il aura tant attendu ; cet enfant sera surnommé le roi de Rome et nommé « Napoléon II ».

CAMPAGNES DE LA PÉNINSULE IBÉRIQUE, D’AUTRICHE, DE RUSSIE ET D’ALLEMAGNE

Le Premier Empire en 1812-1813.

À la suite de l’attitude britannique vis-à-vis des bateaux de commerce français, Napoléon tenta d’imposer le Blocus continental visant à asphyxier l’industrie britannique. Le Portugal, vieil allié des Britanniques, refusa de signer ce traité. Napoléon, recherche donc l’aide de l’Espagne pour envahir le Portugal. Il finit par envahir l’Espagne et installa son frère Joseph Bonaparte comme roi. Le Portugal fut également envahi, mais les trois campagnes (1808, 1810, 1811) menées, notamment par les maréchaux Junot et Masséna ne mirent pas fin à la résistance britanno-portugaise. Une partie de la population espagnole se souleva contre les Français. Bientôt l’excellente infanterie britannique, commandée par le futur duc de Wellington, mit pied en Espagne, en passant par le Portugal, en 1808 et, avec l’aide des nationalistes espagnols, poussa l’armée française hors de la péninsule Ibérique, en 1812. Alors que les meilleures troupes de l’armée française étaient engagées en Espagne, l’Autriche attaqua une nouvelle fois la France en Allemagne et fut finalement vaincue lors de la bataille de Wagram. Le maréchal Lannes, compagnon et ami de l’Empereur, périt à la bataille d’Essling.

Alexandre Ier, poussé par la noblesse russe acquise aux Britanniques, refusa de coopérer avec Napoléon pour porter le coup final au Royaume-Uni. Napoléon, croyant cette guerre inévitable, envahit la Russie en 1812. La Grande Armée, appuyée des alliés italiens, allemands, autrichiens, devint gigantesque : ce sont 600 000 hommes qui franchirent le Niémen.

Les Russes, dirigés par Koutousov, suivirent la stratégie de la terre brûlée, reculant sans cesse devant les troupes françaises. La bataille de la Moskowa, le 12 septembre, ne permit pas de désigner un vainqueur. Bien que les Russes abandonnent le terrain, les pertes furent presque équivalentes dans les deux camps.

Dès le lendemain de l’entrée des troupes françaises dans Moscou, les Russes incendièrent la ville et Napoléon dut faire retraite. L’hiver, soudain en ces régions, était dangereusement proche : Napoléon, espérant une démarche de la part d’Alexandre, fit retarder la retraite jusqu’au dernier moment. Les troupes françaises effectuèrent une retraite extrêmement éprouvante vers l’Allemagne dans l’hiver russe et par les régions dévastées qu’elles avaient parcourues à l’aller. Des 600 000 hommes qui entrèrent en campagne, seules quelques dizaines de milliers franchirent la Bérézina. La Grande Armée était détruite.

CAMPAGNE DE RUSSIE (1812).

Encouragés par ce dramatique échec, plusieurs rois reprirent les armes contre la France. À la suite de deux victoires remportées en Allemagne (Bautzen et Lutzen), une partie de ses troupes le trahit et Napoléon subit une défaite décisive à Leipzig, aussi appelée « Bataille des nations », qui vit s’opposer 180 000 Français à 300 000 alliés (russes, autrichiens, prussiens, suédois). Le maréchal Poniatowski, prince polonais et neveu de Stanislas II, dernier roi de Pologne, y perdit la vie en tentant de traverser l’Elster avec ses hommes. On dénombra 100 000 morts et blessés.

CAMPAGNE DE FRANCE (1814).

En 1814, une alliance entre le Royaume-Uni, la Russie, la Prusse et l’Autriche fut formée. Malgré les incroyables victoires aux batailles de Champaubert et de Montmirail, que Napoléon remporta à la tête d’une armée de jeunes recrues inexpérimentées (les « Marie-Louise »), Paris tomba le 31 mars et les maréchaux forcèrent Napoléon à abdiquer. L’intention de Napoléon était d’abdiquer en faveur de son fils (Napoléon II) mais les puissances alliées exigeaient une abdication inconditionnelle.

Napoléon pensait que les alliés allaient le séparer de l’Impératrice et de son fils le Roi de Rome ; alors, dans la nuit du 12 au 13 avril, il prit la dose de poison qui devait lui permettre de se suicider. On a longtemps crû qu’il s’agissait d’opium dans un peu d’eau, mais il semblerait que ce ne soit pas le cas (cf. Napoléon - Les Grands Moments d’un destin, par Jean Tulard - chap. 44). Les troubles et la nature du malaise de l’Empereur ne correspondent pas à une intoxication par l’opium.

Il a choisi cette mort parce qu’il pensait qu’on allait par la suite exposer son corps aux Français, et il voulait que sa garde reconnaisse son visage calme qu’elle lui connaissait au milieu des batailles. Après de longues minutes d’agonie, l’Empereur se plaignait du lent effet de la substance qu’il avait avalée. Il déclara à Armand de Caulaincourt : « Qu’on a de peine à mourir, qu’on est malheureux d’avoir une constitution qui repousse la fin d’une vie qu’il me tarde tant de voir finir ! ». Les nausées de Napoléon furent de plus en plus violentes, il ne fut plus maître de s’empêcher de vomir, comme il l’avait été jusqu’alors, puis par la suite viennent les effets de vomissement, la longue agonie se poursuivit jusqu’à la venue du docteur Yvan. Napoléon lui demanda de lui donner une autre dose de poison pour qu’il puisse mourir, le docteur refusa en disant qu’il n’était pas un assassin et qu’il ne ferait jamais quelque chose contre sa conscience. Le Docteur eut lui-même une crise de nerfs, s’enfuit à cheval, personne ne le revit. L’agonie de l’empereur se poursuivit, Caulaincourt sortit de la pièce pour demander au valet de chambre et au service intérieur de garder le silence. Napoléon rappela Caulaincourt en lui disant qu’il préférait mourir plutôt que de signer le traité. Les effets du poison se sont par la suite dissipés et l’Empereur a pu reprendre ses activités normales. On ne sait pas exactement comment l’Empereur a survécu à la dose de poison qu’il a prise, soit son estomac se révulsa, soit le poison avait perdu de sa force.

Il fut déchu par le Sénat le 3 avril et exilé à l’île d’Elbe, selon le Traité de Fontainebleau signé le 11 avril, conservant le titre d’Empereur mais ne régnant que sur cette petite île.

LES CENT-JOURS

En France, Louis XVIII écarta « Napoléon II » et prit le pouvoir. Napoléon s’inquiéta du sort de sa femme et surtout de son fils qui était aux mains des Autrichiens. Le gouvernement royaliste refusa bientôt de lui verser la pension promise et des rumeurs circulèrent quant à sa déportation vers une petite île de l’océan Atlantique sud. Napoléon décide donc de retourner sur le continent pour reprendre le pouvoir.

La Route Napoléon et le « Vol de l’Aigle »

-  1er mars 1815 : Débarqués à Golfe-Juan, Napoléon et sa petite troupe, gagnent Cannes où ils arrivent tard et d’où ils repartent tôt. 
-  2 mars : Voulant éviter la voie du Rhône qu’il sait hostile, Napoléon fait prendre alors la route de Grasse pour gagner, par les Alpes, la vallée de la Durance. Au-delà de Grasse, la colonne s’engage dans de mauvais chemins muletiers et s’arrête à Saint-Vallier, Escragnolles, et Séranon. 
-  3 mars : Après une nuit de repos, elle gagne Castellane ; dans l’après-midi, elle atteint Barrême. 
-  4 mars : Napoléon trouve à Digne la route carrossable et fait étape le soir au château de Malijai, attendant avec impatience des nouvelles de Sisteron dont la citadelle, commandant le passage étroit de la Durance, peut lui barrer la route. 
-  5 mars : Sisteron n’est pas gardée et Napoléon y déjeune, puis quitte la localité dans une atmosphère de sympathie naissante. Le soir, il arrive à Gap et y reçoit un accueil enthousiaste. 
-  6 mars : Il couche à Corps. 
-  7 mars : Il gagne la Mure, puis trouve en face de lui, à Laffrey, des troupes envoyées de Grenoble. C’est ici que se situe l’épisode fameux que commémore aujourd’hui, dans la « prairie de la Rencontre », un monument. Le soir même, Napoléon fait son entrée à Grenoble aux cris de « Vive l’Empereur ».

Les armées envoyées pour l’arrêter l’accueillirent en héros partout sur son trajet, sur la route qui porte désormais son nom. Le maréchal Ney, qui avait juré à Louis XVIII de lui ramener Bonaparte dans une cage de fer, s’inclina devant son ancien souverain, ce qui lui valut d’être le seul maréchal exécuté pour trahison lors de la Seconde Restauration. Napoléon arriva sans coup férir à Paris. Cette montée à Paris est connue comme le « Vol de l’Aigle » inspiré des paroles de Napoléon : « L’Aigle volera de clocher en clocher jusqu’aux tours de Notre-Dame ». En 1932, la Route Napoléon sera inaugurée entre Golfe-Juan et Grenoble. Des aigles volants jalonnent ce parcours.

LE RETOUR AU POUVOIR ET LA DÉFAITE FINALE

Le retour de Napoléon aux Tuileries le 20 mars 1815 marque le début de la période dite des Cent-Jours. Napoléon fait établir l’Acte additionnel aux Constitutions de l’Empire (22 avril), connu aussi sous le nom de Charte de 1815. Une Chambre des représentants est élue.

Sur le plan international, Napoléon affirme ses volontés pacifiques puisqu’il n’avait pas le choix, mais les alliés n’acceptent pas ce retour et reprennent les hostilités contre la France. L’armée napoléonienne est finalement défaite à la bataille de Waterloo le 18 juin 1815. La jonction des armées prussiennes et britanniques, que n’a pu empêcher le maréchal Grouchy, eut raison des troupes impériales.

Le retour de Napoléon et sa défaite finale empire la situation internationale de la France. Laquelle est traitée plus durement encore qu’initialement prévu, lors des traités de Vienne. Napoléon laisse une France exsangue. Démographiquement, la France a perdu environ 1 700 000 hommes depuis 1792, dont la majorité pendant les guerres napoléonniennes. Économiquement, la France est ruinée. Ses ports et ses arsenaux sont ruinés. La France a perdu toutes ses colonies qui lui restaient de l’Ancien Régime. Son influence internationale mise en place depuis Richelieu et Louis XIV est réduite à néant. Napoléon laisse une France plus petite territorialement que sous Louis XVI. Même la Sarre et les villes de Marienbourg, Philippeville et Landau, acquises sous Louis XIV, sont cédées aux coalisés. Napoléon laisse une France occupée par les coalisés. La France doit payer une lourde indemnité de guerre pour l’entretien des troupes étrangères sur son territoire. Lorsque Napoléon quitte la France, il n’est pas regretté. C’est à Sainte-Hélène que va pourtant se forger sa légende.

Demandant l’asile au " plus constant de ses ennemis ", l’Angleterre, il est d’abord pris en charge par le Bellorophon, puis transféré le 7 août 1815 sur le Northumberland qui le déposera à Sainte-Hélène.

Il ne met pas un seul pied en Angleterre, les officiers britanniques voulant éviter absolument que Napoléon puisse demander le droit d’asile en revendiquant l’Habeas Corpus Act.

Le capitaine, en l’accueillant, l ’appelle "général Bonaparte" ce qui mettra Napoléon hors de lui.

Les Anglais l’appelleront toujours ainsi puisqu’ils n’ont jamais reconnu l’Empire.

 

 

Déportation à Sainte-Hélène et mort

Napoléon fut emprisonné et déporté par les Britanniques sur l’île Sainte-Hélène, commandée d’abord par l’amiral Cockburn puis par Sir Hudson Lowe, avec une petite troupe de fidèles, parmi lesquels le comte de Las Cases, le général Montholon, et le général Gourgaud, il se consacra à l’écriture de ses mémoires pour la postérité qu’il dicta à Las Cases.

Il essaya aussi d’apprendre l’anglais ; il recevait plusieurs visiteurs de passage à Sainte Hélène, qui à l’époque était une escale importante pour tout navire contournant l’Afrique. Une fois installé à Longwood, il évitait de sortir parce que Lowe avait donné l’ordre que l’empereur devait partout être sous garde.

Progressivement, Napoléon tombe malade et s’affaiblit. Il demanda dans son testament au général Baron de Marbot de continuer à œuvrer dans ses écrits « pour la grandeur de la France ». Dans la seconde moitié du mois d’avril 1821, il écrivit ses dernières volontés et plusieurs codicilles lui-même, une quarantaine de pages au total. Ses derniers mots furent : « France, armée, Joséphine », ou, selon les mémoires de Sainte-Hélène : « tête... armée... Mon Dieu ! ». Nerval, dans son poème À la mort de l’Exilé, note : « Les dernières paroles de Napoléon mourant furent : « Mon Dieu et la nation française... française... mon fils... tête armée ». On ne sait ce que signifiaient ces mots. », et une version courante affirme qu’il aurait dit en fait : « tête d’armée », ce qui est bien moins énigmatique.

Napoléon meurt un samedi, le 5 mai 1821, « à 17 heures et 49 minutes ». Les causes de sa mort ont fait l’objet de controverses, officiellement les medecins ont conclu à une mort des suites d’un cancer de l’estomac, mais il fut avancé l’hypothèse d’un empoisonnement à l’arsenic.

 

 

L’héritage napoléonien

Fin 1799, l’état de la France est catastrophique. L’anarchie administrative règne, les impôts n’arrivent pas aux caisses de l’état, le brigandage s’est développé, les routes sont défoncées, les régions frontalières dévastées à cause de la guerre, le commerce est au plus mal, l’industrie (notamment celle de la soie à Lyon) ruinée, le chômage fait une percée, le prix du pain est trop élevé pour les ouvriers, les hôpitaux ne marchent pas... C’est le moment que Bonaparte, qui était à l’époque encore un général révolutionnaire, choisit pour abandonner son armée en Égypte et monter à Paris, fomenter un coup d’État, le 10 novembre 1799. Entouré d’une auréole de prestige (il vient de sortir vainqueur de la campagne d’Italie et la campagne d’Égypte est, pour le moment, encore une réussite), il ne trouve que peu de résistances et l’opinion publique ne le désavoue pas. Mais les républicains sont inquiets. Napoléon a-t-il permis à la Révolution de s’installer dans le temps, où a-t-il au contraire détruit l’héritage révolutionnaire ? Il solidifie l’héritage de la révolution ; Napoléon en finit avec la République et arrête le mouvement révolutionnaire mais non la Révolution, dont le Consulat sera les trois parties.

Le Consul Napoléon Bonaparte, grâce à une série de mesures, permet à la révolution de s’installer dans le temps. Tout d’abord Bonaparte crée de nouvelles institutions, qui ont survécu jusqu’à aujourd’hui. La nouvelle constitution qu’il fait rédiger renforce le pouvoir exécutif au détriment du pouvoir législatif, crée une administration centralisée, organisée en directions et ministères (dont le nouveau ministère de l’intérieur, confié à Fouché) spécialisés et uniformisés. Il garde les divisions administratives créées lors de la Révolution. Ces institutions solides permettent un renforcement de l’autorité de l’État, font revivre le pays et éloignent un peu plus le risque de retour à l’Ancien Régime. Les caisses de l’État sont renflouées.

Ensuite, Napoléon Bonaparte s’inscrit dans la lignée de la Révolution. Après le coup d’état, les institutions changent, mais la majorité des personnes qui vont occuper des postes étaient déjà en place lors du Directoire : dans les assemblées crées par la Constitution de l’an X, la plupart des sénateurs, tribuns ou membres du Conseil d’État avaient déjà des postes à responsabilité sous le régime précédent, les préfets sont choisis dans les assemblées révolutionnaires... Cela permet à Bonaparte de mieux contrôler l’opposition. Les réformes qu’il met en place sont la suite logique de celles déjà entreprises sous la Révolution. Les réformes financières et commerciales qui lui sont attribuées ont, pour une partie d’entre elles, été imaginées par les membres du Directoire. Ceux-ci avaient déjà tenté le Blocus continental que Napoléon mettra en œuvre contre le Royaume-Uni en 1806. Même certaines techniques de guerre utilisées par Napoléon et dont il est considéré comme l’inventeur avaient déjà été mises en application sous la révolution. La rédaction d’un Code civil français elle-même avait déjà été entreprise sous la révolution. De plus, il stabilise le paysage politique en pacifiant le pays et garantit ainsi l’inscription dans la durée de son gouvernement. La paix signée avec les royalistes Vendéens, dès décembre 1799, marque un grand pas en avant dans l’apaisement du pays, aucun gouvernement auparavant n’avait réussi à l’obtenir.

La signature du Concordat en 1801 permet à Napoléon de s’assurer le soutien de beaucoup de catholiques qui étaient hésitants jusqu’alors, et les royalistes en perdent autant, l’une des raisons fondamentales de l’appui de la population à ce mouvement étant le caractère anti-catholique de la Révolution. Ce Concordat, qui n’instaure pas le catholicisme comme religion dominante et qui aurait put être vu comme une volonté de retour à l’Ancien Régime, permet à Bonaparte d’obtenir une nouvelle légitimité et d’asseoir un peu plus son autorité. Le Concordat maintient la vente des biens nationaux. Grâce à ces deux traités, Bonaparte neutralise l’opposition royaliste et semble s’inscrire dans l’héritage révolutionnaire.

Finalement, le Code civil français est un ouvrage révolutionnaire. Commencé en 1800 et publié finalement en 1804, il remplace tout le droit antérieur, et conserve la méritocratie, l’impôt égalitaire, la conscription, la liberté d’entreprise et de concurrence ainsi que de travail, consacre la disparition de l’aristocratie féodale, et en principe l’égalité devant la Loi. En conservant et en inscrivant dans le Code tous ces acquis de la révolution, Bonaparte leur permit de traverser les régimes et rassura une grande partie de la population.

Mais Napoléon a aussi supprimé bon nombre d’acquis révolutionnaires. Tout d’abord, les cultes révolutionnaires sont abolis. Les libertés d’expression, de réunion, de circulation et de presse sont supprimées au profit d’un état autoritaire et d’une surveillance très accrue de la population, orchestrée par Fouché. L’égalité proclamée dans le Code civil n’est pas respectée : la femme dépend de son mari ; les patrons ont un très grand pouvoir sur les ouvriers ; le livret ouvrier les réduisant à être des quasi-serfs ; l’esclavage est rétabli dans les colonies ; les fonctionnaires sont privilégiés en matière de Justice... Ensuite, l’instauration des préfets, qui sont l’équivalent des intendants, la création du conseil d’État, équivalent du conseil du roi, d’une nouvelle noblesse basée sur la notabilité, les faux plébiscites organisés (des votes sont inventés, il n’y a pas de secret de vote, on ratifie un fait déjà accompli...) font redouter le pire aux jacobins. Le spectre du retour à la monarchie les hante.

Finalement, en devenant tour à tour premier consul, consul à vie puis empereur, il en finit avec la République. La faveur publique lui permet de rédiger la Constitution de l’an VIII, qui lui donne la réalité des pouvoirs et surtout ne fais pas mention de la souveraineté nationale. Cette constitution divise le pouvoir législatif, qui à partir de ce moment, perdra toute influence. C’est au cours de l’an X que s’est opérée la transformation du régime encore républicain en un despotisme auquel ne manquait qu’une couronne. Le poste de premier consul à vie sonne le glas de la République. Néanmoins, lorsqu’il est sacré empereur en 1804, il respecte l’esprit de la Révolution, il change seulement les apparences extérieures du pouvoir exécutif : en effet, entre premier consul et empereur, la différence est essentiellement symbolique. Ces changements de régime permettent surtout à Napoléon d’être de moins en moins dépendant de ses succès ou échecs et lui donnent une autre dimension vis-à-vis des autres dirigeants européens. Napoléon a donc aussi enterré momentanément bon nombre d’acquis révolutionnaires.

Napoléon arrête le mouvement révolutionnaire mais non la Révolution. En obtenant la confiance des bourgeois (grâce à la vente des biens nationaux, à la paix maritime et continentale, à la création d’une noblesse méritocratique...), grâce au prestige de grandes victoires (Marengo 1800), à la bonne résolution des crises telle celle de 1802 (disette et chômage), Napoléon obtient le soutien populaire et s’affranchit peu à peu du processus révolutionnaire, qui ne lui est plus nécessaire. Au fil des années, alors que sa popularité ne va cesser de croître, il va monter en puissance et s’éloigner de la République. En 1804, après divers complots visant son assassinat et la reprise des hostilités avec le Royaume-Uni, il est perçu comme le seul rempart face aux ennemis de la Révolution, et la question de l’hérédité devient un sujet de préoccupations. Il en profite pour se faire sacrer Empereur (ou plutôt, se sacrer). Ce qui pourrait être vu comme l’aboutissement du projet d’un tyran ne l’est pas. En effet, lors du sacre, Napoléon déclara être dans la continuité de la révolution, et est soutenu par les révolutionnaires eux-mêmes, malgré la fin du processus révolutionnaire.

Les guerres impériales ont perpétué la Révolution. Dans tous les pays conquis, Napoléon Ier impose le Code civil et par conséquent toutes les notions révolutionnaires qui en font partie. Il est considéré dans un premier temps comme le libérateur de l’Europe. Mais à partir de la Quatrième coalition, qui commence en 1806, le but de ces guerres ne sera plus la propagation des idées révolutionnaires. Malgré la défaite napoléonienne de 1815, les idées de liberté et d’égalité resteront fermement implantées dans les pays qui avaient été conquis, et de nombreux bouleversements au fil du XIXe siècle en découleront. Grâce à la modernisation des institutions françaises et européennes, à la pacification du pays, à ses victoires militaires et la conquête de la majeure partie de l’Europe, Napoléon a permis l’expansion et la perpétuation de la Révolution. Ainsi, malgré les nombreux changements de régime lors du XIXe siècle, le Code civil français restera en vigueur dans l’Europe entière, et les nombreux principes révolutionnaires qu’il contient. Napoléon est donc plus le continuateur que l’assassin de la révolution, malgré l’impasse qu’il fit sur la République. En supprimant les cultes révolutionnaires et autres acquis révolutionnaires qui mettaient en danger l’œuvre de la révolution elle-même, il permit aux autres de traverser les époques.

 

 

Les réalisations de Napoléon Bonaparte

SOUS LE CONSULAT

Le Consulat est essentiellement une période de pacification et de stabilisation de la France, après la décennie révolutionnaire. De nombreuses institutions sont fondées, qui survivent longtemps à leur créateur ; elles reprennent certains acquis de la Révolution.

-  Le 13 décembre 1799 (22 frimaire an VIII)

  • l’article 52 de la Constitution institue le Conseil d’État.
  • Bonaparte crée le Sénat.

-  Le 13 février 1800 (24 pluviôse an VIII) création de la Banque de France. 
-  Le 17 février 1800 (28 pluviôse an VIII) Bonaparte crée le corps préfectoral. 
-  Le 15 juillet 1801 Napoléon Bonaparte signe avec le pape Pie VII le Concordat. Voir aussi : Jean Baptiste de Belloy 
-  Le 1er mai 1802 (11 floréal An X) le Premier consul crée les lycées. 
-  Le 19 mai 1802 (29 floréal an X) est créée la Légion d’honneur. 
-  Le 24 décembre 1802 sont créées les 22 Chambre de commerce. 
-  1803 : La Louisiane est vendue par la France aux États-Unis, dirigé par Thomas Jefferson, pour quatre-vingt millions de francs.

  • le 7 avril (17 germinal an XI) est créé le franc Germinal.

-  Le 21 mars 1804 (30 ventôse an XII) le Code civil français est promulgué.

SOUS L’EMPIRE

-  En 1806 l’empereur Napoléon Ier commande l’Arc de triomphe de l’Étoile.

  • Le 18 mars 1806 (21 germinal an IX) le premier conseil de prud’hommes est créé à Lyon.
  • Le 10 mai 1806 l’Université est recréée, après son abolition par la Révolution, sous une forme qui conduit aux actuelles universités. 
    -  En 1807 Napoléon confie à Alexandre Théodore Brongniart la construction de la future Bourse de Paris.
  • Le 9 février 1807 il ressuscite la fonction de Grand Sanhédrin (ce qui facilite l’assimilation des juifs dans l’Empire). Napoléon a poursuivi l’œuvre de tolérance à l’égard des juifs amorcée par la Révolution.
  • Le 16 septembre 1807 Napoléon crée la Cour des Comptes. 
    -  Le 17 mars 1808 Napoléon crée par décret le baccalauréat. 
    -  Le 12 février 1810, le Code pénal est promulgué.

L’ŒUVRE LÉGISLATIVE

Bonaparte opéra dès les débuts du Consulat de nombreuses réformes dans l’éducation, la justice, la finance et le système administratif.

Son ensemble de lois civiles, rédigé par Jean-Jacques Régis de Cambacérès et connu sous le nom de Code Napoléon de 1804, a encore une forte influence dans de nombreux pays de nos jours.

Le Code civil français est toutefois très largement inspiré d’un éventail de lois et coutumes diverses déjà existantes sous l’Ancien Régime qu’il unifia. Son œuvre administrative se prolongea jusqu’en 1814. Entre autres réformes, il débutera le travail de cadastrer le territoire français.

EN ARCHITECTURE ET URBANISME

À Paris

-  L’érection de l’Arc de Triomphe du Carrousel (1808) 
-  La construction de la colonne Vendôme (1805-1810) 
-  L’Arc de triomphe de l’Étoile (1806) 
-  La construction du palais Brongniart (Bourse de Paris) 
-  L’Eglise de la Madeleine (finie en 1842) 
-  La percée de la rue de Rivoli, de Castiglione et des Pyramides 
-  La nouvelle façade du palais Bourbon (commencée en 1808) 
-  La liaison entre le Louvre et le palais des Tuileries ; la finition de la Cour carrée du Louvre (construction de l’aile Ouest et Sud) ; le Louvre devient un musée. 
-  La numérotation pair-impair des rues de la capitale 
-  La construction de 3 ponts : le pont des Arts (1803), d’Austerlitz et d’Iéna 
-  Le canal de l’Ourcq, de Saint-Martin et de Saint-Denis 
-  La construction de dizaines de fontaines, comme l’Éléphant de la Bastille 
-  L’aménagement du cimetière du Père Lachaise 
-  L’aménagement de nombreux espaces verts, comme le Jardin des Plantes, ou l’embellisement du jardin du Luxembourg.

En province et à l’étranger

-  La fondation de Napoléon-Vendée (l’actuelle ville de La Roche-sur-Yon) 
-  La transformation de la place Bellecour à Lyon 
-  Le pont de pierre à Bordeaux 
-  La construction de la place de la Paix à Milan.