Mais, plus que son physique, c'est son incroyable efficacité au pied qui est exceptionnelle. Romain Teulet a franchi, début mai, la barre historique des 3 000 points inscrits pour le club tarnais (il en est désormais à 3 022 en 223 matchs). Ce qui constitue tout simplement un record mondial. «C'est quelque chose qui me dépasse, avoue-t-il. J'ai toujours la même passion, le même plaisir que lorsque j'étais gamin et que j'allais buter avec mon filet de ballons.» Issu d'une famille qui vibre pour le rugby, il a joué au football jusqu'à l'âge de 11 ans. Les Girondins de Bordeaux lui font des appels du pied pour passer les tests de détection et intégrer leur centre de formation. Finalement, il choisit l'ovale. «On pouvait prendre le ballon à la main, courir avec, plaquer. Pour moi, tout était réuni pour prendre du plaisir.»

«C'est certes une arme redoutable»

Ouvreur de formation, utilisé à la mêlée, il devient incontournable à l'arrière du CO. «C'est le garant de l'image du club, salue son entraîneur Laurent Labit. Il est là depuis onze ans. Pour un club comme le nôtre, c'est très symbolique.» Mais il serait réducteur d'expliquer la longévité du lutin par sa froide efficacité au pied. «C'est certes une arme redoutable, poursuit Labit. Nos adversaires savent que, s'ils se mettent à la faute, c'est trois points derrière… Mais il a aussi démontré ses qualités balle en main. Malgré sa petite taille, il est très efficace sur les ballons hauts grâce à son timing. Nous avons recruté des joueurs pouvant le concurrencer dans un registre un peu plus défensif mais Romain est devenu meilleur qu'eux…»

L'an dernier, la machine à buter s'est toutefois enrayée au pire moment. Pénalité de la gagne ratée en barrages contre… Montpellier, et défaite d'un point (17-18). «On y pense toujours, forcément. C'est quelque chose qui marque. Mais j'assume cet échec, même si on aurait pu gagner avant, autrement. On a été pénalisé par un carton jaune (du talonneur Bonello) et on n'a pas été au niveau collectivement…» Le lendemain de ce raté, il était pourtant revenu, seul, au stade Pierre-Antoine pour retenter encore et encore cette maudite pénalité. «Cet échec n'était pas dû à un trop plein de pression. Des saisons compliquées où on joue le maintien, j'en ai connues plusieurs.» Plutôt le vent qui avait fait des siennes…

Un monde à part, entre initiés

La solitude du buteur au moment de la pénalité. Un monde à part, entre initiés. Romain Teulet est d'ailleurs régulièrement en contact téléphonique avec Jonny Wilkinson, l'artificier anglais, depuis qu'il officie à Toulon. «Romain est quelqu'un de très positif, et, surtout, de très doué, confie auFigarol'ouvreur de Toulon. Il est très appliqué, c'est un modèle pour les autres.» L'hommage du maître. «Les buteurs ont beaucoup de choses en commun, insiste le champion du monde 2003. C'est bien d'avoir des échanges, de savoir qu'il y a d'autres personnes qui pensent la même chose que vous, qui rencontrent les mêmes difficultés, qui savent ce qui vous passe par la tête et que notre boulot est difficile.»

«On est sur la même longueur d'ondes, acquiesce Romain Teulet. Jonny Wilkinson est La référence mondiale dans ce domaine, il n'y a pas photo. Forcément, c'est un honneur de pouvoir échanger avec lui et de susciter son admiration.» Cette saison, les deux tireurs d'élite se croiseront peut-être une dernière fois: le 9 juin au Stade de France, en cas de finale Castres-Toulon…